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dimanche 15 juillet 2007

La reforme du droit des successions issue de la loi du 23 juin 2006

Depuis 1804, les modes de liquidation des successions ont peu changé. En effet, depuis 1970 la pratique notariale demande une réforme d’ensemble du droit des successions. C’est principalement à la suite d’une condamnation de la France par la CEDH (Cour Européenne des droits de l’homme) en 2000 qu’une première réforme subséquente du droit des successions est intervenue. Ainsi, a été adopté le 3 décembre 2001 une loi portant modification des droits du conjoint survivant et des enfants adultérins. La pratique notariale reproche à cette loi de n’avoir porté que sur des aspects particuliers du droit successoral et a donc réclamé de nouveau une réforme plus générale. C’est pourquoi, une réforme subséquente, touchant le droit des successions dans sa généralité a été effectuée par une loi du 23 juin 2006. Cette loi apportera également quelques dispositions nouvelles concernant le PACS et les régimes matrimoniaux.

Cette réforme a un triple objectif celui de donner plus de liberté pour organiser sa succession, celui de faciliter la gestion du patrimoine successoral et celui d’accélérer et simplifier le règlement des successions. On constate que la réforme se divisent en trois parties en réformant ainsi le droit des successions (voir La reforme du droit des successions issue de la loi du 23 juin 2006), le droit des libéralités (voir La reforme du droit des libéralités issue de la loi du 23 juin 2006) et en apportant des dispositions diverses sur le droit des régimes matrimoniaux et sur le PACS (voir Les dispositions diverses apportées aux régimes matrimoniaux et aux PACS par la loi du 23 juin 2006).


La loi est venue réformer les modes d’acceptation de la succession, la dévolution et l’administration de la succession ainsi que son partage.


  • Les modifications apportées par la loi aux modes d'acceptation de la succession :

L’héritier présomptif a le choix d’accepter ou de renoncer à la succession. Le législateur a voulu, par cette réforme accélérer et simplifier les modes d’acceptation de la succession. Désormais, à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter du décès, un créancier de la succession, un cohéritier ou même l’Etat pourra sommer l’héritier de prendre position dans un délai de deux mois, c'est-à-dire que l’héritier devra accepter ou refuser la succession.

L’héritier qui continuera de garder le silence après cette sommation sera réputé acceptant pur et simple. Si aucune sommation n’est effectuée, l’héritier dispose d’un délai de 10 ans pour opter. S’il ne le fait pas il sera considéré comme renonçant à la succession.

On constate ainsi que les délais ont été réduits puisque auparavant l’héritier présomptif disposait, en l’absence d’action interrogatoire, d’un délai de 30 ans pour opter. En cas de sommation l’héritier disposait d’un double délai de trois mois pour faire l’inventaire et de quatre jours pour opter en conséquent.

La loi nouvelle prévoit une sanction de l’héritier qui a sciemment dissimulé l’existance d’un cohéritier ou qui a recelé des biens ou des droits de la succession. En effet, cet héritier dit receleur sera, quelque soit l’option choisie, considéré comme acceptant pur et simple de la succession. L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés et ce depuis l’ouverture de la succession (jour du décès).

Le législateur a également voulu réduire les risques d’acceptation tacites de la succession en permettant aux héritiers présomptifs d’effectuer, avant même d’avoir opté, l’ensemble des actes nécessaires à la conservation et à l’administration provisoire de la succession. L’héritier qui effectuera ces actes ne sera pas considéré comme acceptant. Il en est de même pour les actes permettant la continuation de l’entreprise. En effet, les héritiers pourront effectuer les actes nécessaires à la continuation de l’entreprise sans toutefois être considéré comme acceptants.

Il existe deux modes d’acceptation, celui de l’acceptation pure et simple et celui de l’acceptation à concurrence de l’actif net.

L’acceptation à concurrence de l’actif net se substitue à l’acceptation sous bénéfice d’inventaire dans le but d'une simplification de la procédure d’acceptation et d’accroître une protection des créanciers. Tout héritier peut opter pour cette acceptation. Il doit alors en faire déclaration au greffe du Tribunal de Grande Instance (TGI) dans le ressort duquel la succession est ouverte. La déclaration fait ainsi l’objet d’une publicité nationale afin de permettre aux créanciers de déclarer leurs créances et de les inscrire. La déclaration de créance non garantie par des sûretés réelles doit être faite dans un délai de 15 mois à compter de la publicité de la déclaration de l’héritier bénéficiaire faute de quoi, elles seront caduques.

A la suite de la déclaration d’acceptation, l’héritier doit faire dresser un inventaire de la succession par un officier ministériel qui doit comporter une estimation du passif et de l’actif de celle-ci. L’inventaire doit être déposé au tribunal dans un délai de deux mois à compter du dépôt de la déclaration.

Ensuite, l’héritier règlera le passif de la succession et payera les créancier inscrits. L’avantage de cette acceptation est qu’elle ne crée pas de confusion entre le patrimoine personnel de l’héritier et le patrimoine successoral. Mais l’inconvénient est que cette acceptation n’entraîne pas la liquidation de la succession. L’héritier s’engage simplement à régler le passif à concurrence de l’actif.

L’héritier peut révoquer son acceptation tant que la prescription du droit d’accepter n’est pas acquise. Dans ce cas, il sera considéré comme acceptant pur et simple mais il ne pourra plus renoncer à la succession.

L’acceptation pure et simple a été peu modifiée par la réforme. Simplement la loi nouvelle a voulu davantage protéger les héritiers contre les dettes inconnues au moment du décès. Cette acceptation peut être expresse ou tacite. Le principe veut que l’héritier acceptant purement et simplement la succession réponde indéfiniment des dettes et charges qui en dépendent. Mais la réforme est venue assouplir ce principe en permettant à l’héritier découvrant postérieurement à son acceptation une importante dette du défunt de demander à être déchargé de cette dette. Pour cela, l’héritier doit prouver qu’au moment de l’acceptation il avait des motifs légitimes d’ignorer et que l’acquittement de celle-ci aurait pour effet d’atteindre gravement son patrimoine personnel.


  • Les modifications apportées par la loi à la dévolution et à l'administration de la succession :

En ce qui concerne la dévolution de la succession, quelques modifications ont été apportées.

Ainsi, le droit de retour de l’adopté simple est supprimé en présence du conjoint survivant qui recueillera les droits sur les biens que le défunt a reçu à titre gratuit de ses père et mère. De plus, la loi affirme clairement une application de la fente pour les droits successoraux des ascendants en l’absence de conjoint successible. En effet, quand le défunt ne laisse que son père ou sa mère et des descendants de l’un ou de l’autre la succession est recueillie par moitié par chaque branche.

De plus, la loi est venue renforcer les droits de l’Etat sur les successions vacantes et en déshérences. La loi vient ainsi clarifier et simplifier le règlement de ces successions. La loi redéfinie les successions vacantes notamment en affirmant que lorsque après l’expiration d’un délai de six mois depuis l’ouverture de la succession, les héritiers connus n’ont pas opté, de manière tacite ou expresse, la succession est dite vacante.

Les successions en déshérence ont été peut modifiée. On peut simplement dire que lorsque l’Etat est envoyé en possession, l’héritier renonçant à la succession ne peut plus revenir sur cette renonciation notamment par une acceptation pure et simple. L’Etat une fois envoyé en possession devient l’héritier de la succession.

En ce qui concerne l’administration de la succession, des apports majeurs ont été fait par la loi du 23 juin 2006. En effet, la loi a instauré le mandat à effet posthume et le mandat successoral judiciaire.

Le mandat posthume touche à la transmission de la succession. Il permet à toute personne de donner à une ou plusieurs autres personnes physiques ou morales un mandat d’administrer ou de gérer (sous réserve des pouvoirs confiés à l’exécuteur testamentaire), toute ou partie de la succession pour le compte et dans l’intérêt de un ou plusieurs héritiers désignés. Le mandataire peut être n’importe quelle personne physique ou morale il peut s’agir même d’un héritier du mandant. En revanche, le notaire chargé de régler la succession ne peut pas être mandataire. Le mandat ne peut être que donné et accepté en la forme authentique. Le mandataire doit accepter sa mission avant que le mandant ne décède. Afin d’éviter que le mandat à effet posthume ne soit trop souvent utilisé sans juste motif, la loi impose à sa validité qu’il soit justifié par un intérêt sérieux et légitime. De plus, la durée du mandat ne peut excéder deux ans sauf si le mandat est justifié par l’inaptitude ou l’âge de l’héritier le délai peut être porté à cinq ans.

Chaque année, le mandataire devra rendre compte aux héritiers concernés par le mandat.

Durant le délai d’option des héritiers, le mandataire ne pourra effectuer que les actes conservatoires ou de surveillance et les actes d’administration provisoire si aucun héritier concerné par le mandat n’a accepté la succession. Une fois que l’héritier a accepté la succession, les pouvoirs du mandataire sont définis par renvoi au droit commun du mandat.

En principe, ce mandat s’exerce à titre gratuit mais la convention peut prévoir une rémunération.

Avant l’exécution du mandat, le mandant et le mandataire peuvent renoncer au mandat en informant l’autre partie de cette décision. Durant l’exécution le mandataire peut renoncer a sa mission. Dans ce cas, il doit en informer les héritiers intéressés.

Sept causes peuvent mettre fin au mandat :

  1. par l’arrivée du terme prévu,
  2. par la renonciation du mandataire,
  3. par la révocation judiciaire,
  4. par la conclusion d’un mandat conventionnel entre les héritiers et le mandataire,
  5. par l’aliénation des biens mentionnés dans le mandat par les héritiers ,
  6. par le décès ou la mise en protection du mandataire,
  7. par le décès de l’héritier intéressé par le mandat.

Lorsqu’il existe entre les héritiers un désaccord persistant empêchant la succession d’être réglée ou lorsqu’il y a carence ou faute de l’un d’eux, le juge peut désigner un mandataire successoral. La demande de désignation peut être faite par un héritier, par un créancier, par toute personne intéressée et par le ministère public. La décision de nomination est enregistrée et publiée.

Avant que l’option ne soit levée par les héritiers, le mandataire ne dispose que du pouvoir d’effectuer les actes de conservation et de surveillance et les actes d’administration provisoire. Lorsque la succession est acceptée par au moins un des héritiers, le juge peut autoriser le mandataire a effectuer tous les actes d’administration de la succession.

Toujours en ce qui concerne l’administration de la succession, la loi est venue assouplir les règles de l’indivision. En effet, elle aide les indivisaires minoritaires en permettant une nouvelle majorité pour les actes de gestion de l’indivision. En effet, l’unanimité n’est plus requise dans ce cas puisque la majorité des 2/3 suffit. En revanche, pour les actes de disposition, l’unanimité est maintenue.


  • Les modifications apportées par la loi aux opérations de partage de la succession :

La loi nouvelle souhaite faciliter le partage de la succession, elle permet ainsi de liciter les biens démembrés. La licitation peut ainsi porter sur l’usufruit ou la pleine propriété du bien. Mais les héritiers peuvent également demander au juge de maintenir l’indivision pendant un certain temps. Ainsi, à défaut d’accord amiable entre les héritiers ceux-ci pourront demander au juge de maintenir l’indivision de l’entreprise cédée, du local d’habitation ou du local à usage professionnel. La loi nouvelle ajoute que les meubles garnissant ce local ou ceux servant à l’exercice de la profession peuvent eux être maintenus dans l’indivision. En principe, le maintient de cette indivision ne peut excéder 5 ans mais ce délai peut être prolongé notamment en présence d’héritiers mineurs.

L’apport majeur de cette loi en matière de partage a été de substituer l’égalité en valeur à l’égalité en nature. En effet, désormais, le principe est que l’égalité dans le partage est une égalité en valeur. Lorsqu’il y a une inégalité la compensation se fait par une soulte. Afin de permettre cette égalité, il faut avoir une estimation précise de la valeur du bien partagé, c’est pourquoi la loi nouvelle défini ces règles d’estimation en affirmant que les biens sont estimés à leurs valeurs à la date de la jouissance divise telle qu’elle est fixée par l’acte de partage.

La loi a également voulu favoriser le partage amiable en faisant du partage judiciaire une exception, afin de réduire l’intervention du juge.

Ainsi, en présence d’un héritier absent ou présumé absent ou d’une personne mise sous protection (tutelle, curatelle), un partage amiable est désormais possible. En effet, le partage peut intervenir sous le contrôle du juge des tutelles avec la simple approbation du conseil de famille. De plus, lorsqu’un héritier ne manifeste pas sa volonté de partage ou de non partage, les copartageants pourront contraindre cet hériter par acte extrajudiciaire de ce faire représenter au partage amiable. La loi nouvelle affirme aussi que le partage amiable peut être partiel ou total.

En ce qui concerne les actions en nullité du partage ou en complément de part, la loi est venue y porter des modifications afin d’éviter une remise en cause du partage en sa totalité.

Ainsi, la loi nouvelle prévoit qu’en plus de la violence et du dol, le partage peut être demandé pour cause d’erreur. Mais l’erreur n’est admise que si elle porte sur l’existence ou la quotité des droits des copartageants ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable.

La loi nouvelle remplace l'action en rescision du partage pour lésion par l'action en complément de part pour permettre au partage déjà effectué d'être maintenu. Ainsi, lorsqu'un héritier subit une lésion de plus du quart de la valeur du partage, il se verra attribuer un complément de part soit en nature si cela est possible, soit en valeur. Cette action est seulement exclue pour les actes aléatoires.


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